Pierre-Laurent Aimard © Guy Vivien

Pierre-Laurent Aimard

 

NOTES DE PROGRAMME :

J’ai toujours été touché par la dimension artistique de Liszt, par son esprit d’exploration, son ouverture d’esprit extraordinaire, son humanité et sa générosité. Je souhaite rendre sensible l’extrême variété de ses compositions, de ses influences et la dimension de musicien du futur qu’il revendiquait et qui n’est pas toujours soulignée dans les programmes des concerts. Ce programme, construit autour de la Sonate de Liszt, met en lumière la complexité de cette œuvre, tous les niveaux de recherche possibles, le travail sur les motifs – les mêmes thèmes se transforment constamment au gré des changements de caractère et de la dramaturgie de la pièce – et le souci de continuité dans la grande forme qui est aussi une caractéristique de cette 2ème partie du 19ème siècle. De ce point de vue, Wagner est un frère d’armes de Liszt, dans ses opéras, et il est présent dans ce programme avec une sonate qui date de l’époque de Tristan – ce qui est curieux vu son langage – et qui atteste de la très forte relation entre Wagner et Liszt. Dans ces sonates, Liszt et Wagner allient les 4 mouvements de la sonate en une forme sonate d’un seul bloc ; c’est un challenge de la forme que Liszt a rarement, ou jamais, atteint de cette façon. Scriabine, avec sa 9ème Sonate, crée un nouveau monde instrumental avec une façon tout à fait nouvelle d’écrire pour le piano. La recherche esthétique a généré un renouvellement dans l’écriture et la virtuosité de l’instrument, tournées vers le futur également.  L’œuvre est aussi en un seul mouvement.
La lugubre Gondole, écrite en hommage, ou plutôt en tristesse au départ de Wagner, introduit la Sonate d’album de Wagner : au début de la pièce, l’intervalle de sixte – intervalle emblématique du début du Tristan de Wagner – est présent dans l’accompagnement et dans le chant. Toutes les incertitudes harmoniques de cette lugubre Gondole viennent se résoudre dans les certitudes harmoniques de la Sonate d’album de Wagner. Caché dans cette sonate, le même intervalle de sixte descendant lie les deux pièces de façon organique.
Sinistre, qui porte bien son nom, commence par une recherche d’intervalle qui aboutit sur un triton –  l’intervalle du Diable ! – plusieurs fois répété. Le point culminant de cette œuvre menaçante, expressionniste avant l’heure, nous fait entendre un accord résolument tourné vers le futur, qui ne fait partie d’aucun vocabulaire hérité : Liszt se lance vers des territoires totalement nouveaux.
La confrontation de ces sonates en un seul mouvement et des trois pièces tardives de Liszt, qui mettent en perspective leur modernité, nous font sentir non seulement les richesses multiples de la Sonate de Liszt, mais aussi sa modernité extraordinaire pour l’époque. On l’entend souvent aujourd’hui comme une pièce de conservatoire, de routine. A l’époque, les différentes modernités harmoniques, le travail thématique et d’intégration de la virtuosité dans une architecture donnée étaient véritablement des innovations à couper le souflle.

NOTES DE PROGRAMME :

J’ai toujours été touché par la dimension artistique de Liszt, par son esprit d’exploration, son ouverture d’esprit extraordinaire, son humanité et sa générosité. Je souhaite rendre sensible l’extrême variété de ses compositions, de ses influences et la dimension de musicien du futur qu’il revendiquait et qui n’est pas toujours soulignée dans les programmes des concerts. Ce programme, construit autour de la Sonate de Liszt, met en lumière la complexité de cette œuvre, tous les niveaux de recherche possibles, le travail sur les motifs – les mêmes thèmes se transforment constamment au gré des changements de caractère et de la dramaturgie de la pièce – et le souci de continuité dans la grande forme qui est aussi une caractéristique de cette 2ème partie du 19ème siècle. De ce point de vue, Wagner est un frère d’armes de Liszt, dans ses opéras, et il est présent dans ce programme avec une sonate qui date de l’époque de Tristan – ce qui est curieux vu son langage – et qui atteste de la très forte relation entre Wagner et Liszt. Dans ces sonates, Liszt et Wagner allient les 4 mouvements de la sonate en une forme sonate d’un seul bloc ; c’est un challenge de la forme que Liszt a rarement, ou jamais, atteint de cette façon. Scriabine, avec sa 9ème Sonate, crée un nouveau monde instrumental avec une façon tout à fait nouvelle d’écrire pour le piano. La recherche esthétique a généré un renouvellement dans l’écriture et la virtuosité de l’instrument, tournées vers le futur également.  L’œuvre est aussi en un seul mouvement.
La lugubre Gondole, écrite en hommage, ou plutôt en tristesse au départ de Wagner, introduit la Sonate d’album de Wagner : au début de la pièce, l’intervalle de sixte – intervalle emblématique du début du Tristan de Wagner – est présent dans l’accompagnement et dans le chant. Toutes les incertitudes harmoniques de cette lugubre Gondole viennent se résoudre dans les certitudes harmoniques de la Sonate d’album de Wagner. Caché dans cette sonate, le même intervalle de sixte descendant lie les deux pièces de façon organique.
Sinistre, qui porte bien son nom, commence par une recherche d’intervalle qui aboutit sur un triton –  l’intervalle du Diable ! – plusieurs fois répété. Le point culminant de cette œuvre menaçante, expressionniste avant l’heure, nous fait entendre un accord résolument tourné vers le futur, qui ne fait partie d’aucun vocabulaire hérité : Liszt se lance vers des territoires totalement nouveaux.
La confrontation de ces sonates en un seul mouvement et des trois pièces tardives de Liszt, qui mettent en perspective leur modernité, nous font sentir non seulement les richesses multiples de la Sonate de Liszt, mais aussi sa modernité extraordinaire pour l’époque. On l’entend souvent aujourd’hui comme une pièce de conservatoire, de routine. A l’époque, les différentes modernités harmoniques, le travail thématique et d’intégration de la virtuosité dans une architecture donnée étaient véritablement des innovations à couper le souflle.